Pas plus tard que dimanche à Bar sur Aube (où les pilotes parisiens furent nombreux !), je venais de faire deux vols de 1h30 environ dans des conditions tranquilles et en plus ça ne montait pas bien haut, donc tout le monde ou presque dans le bocal. j’ai fait quelques tentatives d’échappées vent de cul et puis face au vent plein est, pour aller poser dans un champ. Bref. Il est 18h, vais-je faire mon troisième vol ? Plus grand monde en l’air, les feuilles et branches des arbres sont bien agitées; je décide de patienter un peu; Par rapport à la fin de matinée et le milieu d’après-midi ça a quand même forci. Avec des rafales en plus (23 max). Et puis à force de regarder les cycles et les quelques rares voiles en l’air se faisant scotcher, je décide d’y aller. Car l’air n’est pas malsain. C’est juste un peu fort. Je’irai devant et ne tenterai pas de monter. Les prévisions annonçaient ce fameux renforcement. Au pire, j’irai accélérateur à fond me poser car la manche en bas ne bouge pas beaucoup, donc ce ne sont que des couches de vent.
Pour moi, c’est le décollage le moment critique. Si la voile se tortille dans tous les sens avant que je la fasse monter, c’est rédhibitoire. j’attends le bon créneau et hop j’y vais, un peu secoué au déco une fois en l’air, la sortie est propre mais pas mal de roulis. Une fois sorti, je mets le pied sur l’accélérateur au cas où, je surveille la vitesse GPS et la balise. Ca monte partout, ce n’est pas fort mais soutenu, 13 km/h bras hauts environ. J’avais envie d’en découdre et étais prêt au combat. Puis 20 minutes plus tard, les débutants ont pu décoller et le reste a été de l’huile en restitution…
Donc comme Triple Seven, j’aurais regretté de ne pas me mettre en l’air et pendant 15 minutes j’avais quasiment le ciel pour moi tout seul ! 
Mes conclusions : quand on a le mental, c’est bon. Quand on a des plans de secours, c’est mieux. Entre scotché (comme la veille avec du vent jusqu’à 30 à la balise en rafales et parfois devoir rentrer à l’accélérateur deuxième barreau) et avoir un air malsain, mon choix est fait. Si on sait ce qui nous attend et si on sait qu’on peut le gérer (mais ça c’est chaque pilote qui doit s’écouter). Le pire c’est quand on ne s’attend pas à se battre et qu’on se demande ce qu’on fait en l’air. Et quand on ne le sent pas, on regarde les autres 
Le processus de décision : décoller ou renoncer, exemple vécu.
On peut également réfléchir à la question atterrir ou pas !
Beaucoup de personnes une fois en vol renoncent alors que d’autres continuent quitte à se mettre en danger ou au mieux se font peur.
C’est justement par ce que c’est du loisir qu’il y a bcp de prises de décisions qui se font sur de l’émotionnel… Et surtout ce point : “je n’ai pas volé depuis longtemps et l’envie est là, bien présente”, ou le “j’ai fais tout ce déniv, trop les boules de redescendre à pieds”, ou encore “j’en rêve depuis si longtemps, aujourd’hui c’est le seul jour où je peux”, voir même “me suis trop pris la tête au boulot ce matin, je fonce voler cet aprèm”…
Tous les jours des décisions de vol sont prises sur ces facteurs émotionnels, si le vol n’était pas émotionnel, il n’y aurait plus personne en vol, ni même les pros, puisqu’ils réalisent les émotions des autres.
Au contraire, les évoquer, savoir qu’elles participent au décollage, et même au vol lui même est important pour apprendre à les prendre en compte et les canaliser au mieux.
sauf si je ne comprends rien à ton message, tu dis exactement la même chose (peut être en mieux) : les identifier pour qu’elles ne viennent pas interférer (ie “les canaliser” dans ta phrase) avec les autres éléments dans ta prise de décision de voler ou pas !
Pour les évacuer (dans ma phrase), il faut bien les identifier au préalable.
Ce que je disais initialement, c’est qu’une fois que tu les as identifiés (les 4 points de 777 cités plus haut), ils ne doivent pas venir en positif ou en négatif (ce que j’appelais “les évacuer”) dans la décision de se mettre en l’air.

celle là est particulierement pénible parce que pendant la montée on essaye de se cacher qu’il y a un souci dans l’analyse aerologique qui nous avait fait choisir cette rando 
Mais au contraire ces critères font partie de ma décision.
Ce sont aussi des points pour lesquels je vole. Ils interviennent intimement dans mes prises de décision. Ils viennent ici en “positif” ; s’ils ne sont pas là, ma décision peut-être toute autre.
Voyons un peu :
- j’ai pas volé depuis longtemps et j’ai envie : ce critère là a un poids faible, les plus beaux vols sont toujours ceux à venir et les occasions de vol reviennent sans cesse, c’est pas ça qui va me pousser à me mettre dans un plan foireux.
- il fait trop chaud pour replier : ça n’a l’air de rien mais pour moi c’est important et il est rare que je ne décolle pas si j’ai préparé mes affaires (mais c’est arrivé 2 fois cette année). Ce jour-là, j’imagine que si je n’avais pas monté la pente, si je n’avais pas préparé mon matériel, si j’étais resté sur le parking et que j’avais vu redescendre à pied des pilotes qui m’auraient dit qu’ils renonçaient pour cause de conditions moisies, je n’aurai peut-être pas volé.
- je veux contrôler la voile : ça joue dans la décision, mais je pense qu’avec mon aile perso j’aurais volé aussi pour cause d’envie.
- je veux comparer avec la Tala : là ça compte fortement dans la décision ; c’est pas tous les jours que j’ai l’occasion de voler à côté d’une aile récente pilotée par quelqu’un que je connais.
Je ne tiens absolument pas à évacuer ces critères, ils font partie des raisons pour lesquelles je vole.
Bonjour,
Je trouve qu’il y a beaucoup d’infos intéressantes sur ce post.
Il est tout à fait clair que les facteurs émotionnels ou subjectifs interfèrent avec notre décision de décoller ou non.
Prenons l’exemple :
J’ai fait tout ce déniv, trop les boules de redescendre à pied.
Je pratique le parapente en haute montagne depuis plus de 20 ans (c’est pour cela que je me suis au parapente) et je sais très bien depuis le début de ma pratique qu’il y a vraiment un gros risque à vouloir décoller à tout prix lorsque l’on est là-haut, histoire d’éviter des heures et des heures de descente fatigante et éventuellement compliquée.
Je crois que j’ai vraiment intégré dans ma tête qu’il vaut beaucoup mieux renoncer au vol (même en haute montagne !) si on ne le sent pas, même si d’autres pilotes ont décollé et même si la descente à pied va être longue et laborieuse.
J’ai cela quelque part dans ma tête pendant l’ascension et le vol sera éventuellement la cerise sur le gâteau, mais je pars toujours avec l’idée que le vol n’aura peut-être pas lieu…
J’ai réalisé un paquet de vols en haute montagne, mais j’ai aussi marqué quelques (rares) buts, alors qu’il aurait sans doute été possible de décoller (?).
Je suis ainsi redescendu, avec la voile sur le dos, du sommet du Mont-Blanc ou du Dôme des Ecrins alors que le vol aurait peut-être été possible, mais je ne le sentais pas…
Exemple : au sommet du Mont-Blanc, avec des amis, le vent était trop soutenu pour décoller en sécurité à mes yeux.
Nous avons rencontré là-haut Zébulon (que je connais bien), sa femme Claire et des clients à eux.
Zébulon est descendu sous le sommet pour aider ses clients à décoller et il nous a proposé de nous aider à décoller (sympa et sécurisant de sa part !).
Je ne sentais vraiment pas le coup et j’ai refusé son offre, en espérant que nous pourrions décoller de plus bas (du Dôme du Goûter ou du refuge Vallot).
En fait nous sommes redescendus à pied jusqu’à Chamonix (nous sommes arrivés trop tard pour la dernière benne de l’Aiguille du Midi) après avoir passé un temps fou à sortir du labyrinthe de crevasses de la Jonction sous le refuge des Grands Mulets.
Nous sommes arrivés à minuit à Chamonix et je n’ai jamais regretté de ne pas avoir accepté l’aide proposée par Zébulon (le vol aurait sans doute eu lieu et je ne vous parle pas de la descente à pied du sommet du Mont-Blanc jusqu’à Chamonix en étant partis le matin vers 2h30 du refuge des Cosmiques…
).
Des amis me disent parfois que je prends trop de marges pour envisager mes vols et que je pourrais accepter certaines conditions qui me semblent quelque peu foireuses.
Chacun de nous met son propre curseur au niveau qu’il souhaite.
Je préfère être trop prudent vis-à-vis de mes capacités personnelles plutôt que pas assez.
De toute façon je n’ai aucun plaisir à être en l’air lorsque je ne me sens pas bien là-haut (c’est déjà arrivé bien sûr), alors que je connais des amis pilotes qui apprécient d’avoir vécu un vol difficile et “éprouvant” !
Chacun a vraiment son approche par rapport à cela.
Personnellement cela ne me gêne pas d’avoir raté un vol magnifique qui aurait sans doute pu avoir lieu…
Qu’est-ce qu’un vol de plus ou de moins dans une vie ?
La plupart des pilotes que je connais qui se sont fait mal, voire très mal, étaient en général des pilotes qui se donnaient des marges de sécurité très faibles et qui avaient un vrai plaisir à se rapprocher au plus près de leurs limites personnelles.
Ils étaient vraiment contents d’avoir réussi à gérer un vol en conditions difficiles, voire carrément foireuses, alors que je déteste cela.
De toute façon, dès que les conditions en vol ne sont plus agréables pour moi, j’abrège le vol et je vais me poser, et certains pilotes viennent ensuite me trouver en me demandant pourquoi je suis allé me poser alors qu’il était possible de tenir encore en l’air…
Cela ne veut bien sûr pas dire qu’il ne m’arrivera jamais de me retrouver dans des conditions qui dépasseront mes compétences, mais j’aurais pris, autant que je puisse le sentir, les marges de sécurité qui me semblent nécessaires…
Cela n’évitera peut-être pas un jour le mauvais choix et de mauvaises conséquences et j’en suis tout à fait conscient.
A+ Marc
@ BenHoit : on ne dit pas exactement la même chose, toi tu dis que tu identifie pour ne pas laisser interférer, moi ce que je dis c’est qu’il faut savoir identifier pour se rendre compte que ca influence et surtout jusqu’à quel point.
@ Marc : effectivement c’est une sacrée décision de redescendre du Mont-Blanc à pieds, bravo. J’ai aussi fais ça plusieurs fois à mon niveau (600m de D+), mais il est certain que des fois ça influence, certaines personnes plus que d’autres, il faut en tenir compte.
karma+
je suis l’exact contraire de Marc dont je respecte TOTALEMENT la prudence
Je n’ai jamais renoncé à un vol en étant au déco par moins de 30k/h de vent (rafales) (par contre je sais renoncer sur analyse météo préalable)
Je me suis souvent fait peur et souvent pensé que je serais mieux au sol qu’en l’air. Mais arrivé au sol, toujours sans aucun bobo (les gros caramels je les ai pris par inadvertance au ras du sol, par conditions normales), quel bonheur d’en être sorti et donc d’y être allé!
Plus vivant d’avoir été mort de peur
Bon j’ai pas mal évolué vers le renoncement depuis qq années, normal à mon âge
Allez y j’ai le gilet pare balles…
PS ne vous faites pas croire qu’un ordinateur est à la place de votre libre arbitre sur un déco
Plein de facteurs perso entrent en compte, acceptez les et volez au mieux… chacun à sa façon
Bah s’il n’y avait pas les raisons (bonnes ou “mauvaises”) d’avoir envie ou besoin de voler, on n’irait pas.
Objectivement, quoi qu’on fasse, on prend tout de même au moins un peu plus de risque à voler qu’à faire du macramé.
Donc si on décide de voler, c’est que le rapport bénéfice attendu / risques perçus est en faveur de la décision de décollage.
Il est bon de savoir analyser le risque, il est sain d’être conscient de notre perception du bénéfice attendu.