Tiens, marrant ce déterrage. J’ai pas tout lu mais je peux raconter mon histoire en espérant que ça servira à quelques jeunots. Ça pourrait s’intituler “Quand on cherche, on trouve”…
Ce devait être en 1998. A l’époque je n’avais encore jamais volé avec une voile compétition et j’avais un copain qui venait de se pointer avec sa toute nouvelle Tigra, aile compète de chez Apco. Il commence évidemment à me proposer de l’essayer et je lui dis, non, c’est pas raisonnable, j’ai pas le niveau, patati et patata… On se retrouve à l’atterro après un vol pas terrible en conditions faibles. Bien sûr ça me démangeait et on en reparle. Allez, ça va être un vol de fin de journée, je craque ! Petit problème, je faisais à l’époque un ptv de 75 kg et le bas de fourchette de sa taille était à 85 kg… Mais la décision d’être con étant prise, on trouve toujours des solutions. Son matos étant bien plus lourd que le mien, il me passe tout et comme ça j’arriverai bien au moins à un peu plus de 80… Et nous revoilà au déco, lui me faisant la rotation et moi avec une aile compétition trop grande et inconnue, une nouvelle sellette pas à ma taille et réglée pour lui, et chargé comme une mule pour peser plus. Tiens, au moment de partir on s’aperçoit que si j’ai pris un maximum de trucs inutiles, j’ai par contre oublié ma radio en bas !
Je finis par m’arracher du sol, impatient de tester la bête. Pas de thermique devant le décollage, je file donc droit vers le relief le mieux exposé Ouest. Je ne suis pas impressionné par la vitesse mais par le planer oui. Arrivé à destination, je remonte dans des bulles, sans trop rien sentir à la commande, tout au taux de chute (excellent) et au rendement du virage. Je vole 3/4 d’heure comme ça, je suis le seul à tenir en l’air… Je teste une ligne droite vers le village, trims lâchés et là ouais ! ça avance et ça ne perd pas ! Demi-tour, je reviens au relief, je re-trimme tout et ça remonte ! Bon, mais va falloir se poser, je les vois tous qui m’attendent en bas. Donc, direction l’atterro. Comme j’ai trouvé que ça bougeait pas beaucoup cet engin avec son suspentage long, tiens faisons un peu de tangage pour voir. Allez, j’enfonce, je relâche, il ne se passe pas grand chose. Je continue, bon ça passe pas vraiment devant. Niarf ! Je vais lui en mettre un bon coup, j’enfoooonnnce… Hirf ! Les freins molissent direct ; je relâââche progressivement… Ouf ! pas d’abattée… Mais bizarre, l’aile est molle et en fait je m’enfonce à la verticale avec de vagues mouvements de lacet. Belle parachutale très cher… ! Je regarde l’aile, ça serpente un peu au-dessus de la tête. Coup d’œil vers le bas, j’ai du gaz et ça ne descend pas fort. Allez faut que ça revole : mains dans les poulies… Ça aurait pu revoler…Mais ça ré attaque toujours dissymétrique et j’ai peur de ne pas maitriser l’abattée. Donc à chaque fois je cherche à rééquilibrer par de petites corrections aux freins… Erreur ! Je ma la réexpédie toujours en parachutale. Je garde l’œil rivé sur la voile et c’est ainsi que je vois passer des feuilles, des brindilles, des branches et chhraaff ! me voilà bloqué dans l’arbre. Je le crois pas ! Je suis branché !
Je crie en direction de l’atterro que tout va bien (pas de radio…) et je me prépare à attendre les secours. Je sais que dans cette configuration on se sur-accidente en voulant descendre par ses propres moyens… Donc je me cale dans la sellette… j’ai bien du tenir 42 secondes… Bon, je suis accroché par le haut, pendu à environ 4 mètres du tronc sur un hêtre de 30 mètres de hauteur… cette branchette là, si je tends le bras je peux l’atteindre… tiens elle résiste, je tire dessus et me tractionne vers le tronc… je finis par arriver à le ceinturer malgré l’aile qui me tire fort en arrière… voyons, c’est des boucles automatiques, ah oui la ventrale s’ouvre d’une main… clic, clac les cuissardes aussi et sschhtoïïïng ! tout le bazar remonte en effet fronde 5 ou 6 mètres plus haut et pend dans le vide ! Merde, pas prévu ça !
En attendant, descendons. Facile au début, un véritable escalier… mais voilà, encore bien haut, plus de branches ! Le tronc lisse. Bon, vais pas m’arrêter là, je ceinture le tronc et commence à me laisser glisser… mais il devient rapidement de plus en plus gros, je sens que je vais finir par lâcher, les bras écartés ! Non ! Juste avant de lâcher prise je touche le sol… sur un muret d’1,50m de haut (sur lequel le hêtre appuie sa base) qui donne dans la pente et je manque de peu de tomber en déséquilibre dans les cailloux ! Je me rattrape in-extrémis et m’assied… Re-Ouf !
Cinq minutes de marche plus tard je croise l’équipe de secours qui montait à ma rencontre. Un copain est venu avec des cordes et une scie, il remonte dans le hêtre, scie une seule branche et tout le matos tombe. Une heure après la parachutale on est à l’atterro, je n’ai absolument rien et le matériel non plus.
Pendant toute la durée du sketch, j’ai gardé le regard fixé sur la voile, je suis arrivé près du sol sans m’en rendre compte, s’il n’y avait pas eu d’arbres ç’aurait été pareil !
Tout le temps je n’ai pensé qu’à me battre pour faire revoler l’aile mais ma technique était défaillante.
Jamais l’option secours ne m’a traversé l’esprit.
Depuis, j’ai toujours dans les poches latérales de la sellette de quoi m’assurer ou remonter une corde, ainsi qu’une scie pliante. C’est du lest utile…