Autant j’ai été émue hier en apprenant la mort de Jean d’Ormesson, autant celle de Johnny me laisse de marbre.
Je n’aimais pas ce mec, je n’aimais pas sa façon de chanter (ou plutôt de hurler) mais je reconnaissais chez lui un talent certain pour occuper la scène, c’était vraiment ce qu’on appelle “une bête de scène”.
Mon beau-frère lui avait “foutu sur la gueule” un jour, il en rigole encore 60ans plus tard. Il faisait partie de la bande du “tas de briques” (la cité SNCF d’Asnières) et Johnny était avec la bande de Bécon, quartier “rupin” à la limite d’Asnières et de Courbevoie.
C’était en 59 ou en 60, bref mon beau-frère était devant la télé quand il avait vu pour la première fois Johnny, tout débutant. “Hé mais c’est un mec de la bande de Bécon, je lui ai collé un marron samedi dernier”!
Je ne suis jamais allée voir Johnny sur scène et je n’ai jamais aimé sa manière de chanter, sa voix ni sa vulgarité. A cette époque (l’époque yéyé) j’aimais le rock américain (Chuck Berry, Eddie Cochran, Buddy Holly et Ray Charles) et parmi les Français j’aimais bien Schmoll, mais pas plus que ça. J’avais 14ans et j’étais en 2de, mes chanteurs préférés étaient Brassens et Brel, et cela dure toujours, j’y ajoutai un peu plus tard Barbara et Léo Ferré.
Ils me manquent tous les quatre mais Johnny ne me manquera jamais.
J’aimais bien les Rolling Stones au temps de Brian Jones, un peu moins les Beatles, et dans le paysage médiatique américain mes préférences allaient à Joan Baez et Bob Dylan, en ajoutant Graeme Alwright (qui était australien) et Leonard Cohen (qui était canadien).
En musique “moderne”, j’aime toujours les Pink Floyd.
J’ai horreur du son industriel et des gens qui hurlent, et pire encore du martèlement épouvantable du rap, textes le plus souvent indigents sur fond sonore violent qui met du jeu dans les vertèbres et ne mérite pas le nom de musique.
Pour moi, la musique c’est d’abord JS Bach, puis Mozart, Liszt, Beethoven, Vivaldi, Chopin, bref LA MUSIQUE.
J’ai horreur de l’opéra.
Johnny grattait la guitare comme on secoue une grille de prison (le mot est de René Fallet, ainsi écrivit-il dans le Canard quand il rendit compte de sa découverte de Brassens).
Brassens était un poète et un musicien très exigeant, Johnny n’était ni l’un ni l’autre, c’était juste un braillard.
Dans sa chanson “le Temps passé”, Brassens chantait “les morts sont tous des braves types”. Johnny était un brave type, un mec gentil et serviable qui avait plein de copains.
Ce qui me dérange un peu c’est qu’on va enterrer Johnny Hallyday et que personne n’enterrera Jean-Philippe Smet.
Ce n’est pas mon problème mais c’est quand même un des derniers pans de ma jeunesse qui vient de foutre le camp, c’est là que pourraient se situer d’éventuels regrets.
