Je me permets de revenir sur l’intervention d’Alpyr et sur les conditions de lundi dernier. Vent météo annoncé Nord de ouf, je fais mes prévis le dimanche soir, même pour des sites dits « protégés » les valeurs de vent annoncées sont bien trop hautes pour moi et pis généralement je n’aime pas aller “à Montlambert en cas de Nord”, fausse bonne idée selon mes expériences passées : oui certes c’est protégé mais souvent les thermiques sont peu agréables et dès qu’on a fait un peu de gain, on se fait tarter bien comme il faut donc très peu pour moi, merci mais non merci !
Sauf que ce lundi je suis sensée rejoindre un stage de ligue encadré par Cyprien Champ, Charles Cazaux et Jonathan Marin, forcément ça fait réfléchir… Je préviens donc le groupe que j’ai de gros doutes sur la journée de demain et que je prendrai la décision de venir à la dernière minute.
Le matin, j’ouvre un œil, je suis fraîche et dispo, je suis persuadée que ça ne va pas voler mais puisque j’ai posé ma journée, je me dis que ça ne coûte rien d’aller là-bas, au moins pour rencontrer le groupe et les entraîneurs. Je pars donc en mode light (instruments chargés? j’en sais rien, pas de lest, pas de couche, je mets la voile dans la voiture pour le principe mais c’est tout). Une fois sur place, (partie en mode tellement light, j’ai oublié mon portefeuille ! j’ai donc dû sortir de l’autoroute plus tôt et prendre les petites nationales tout ça avec le moteur sur la réserve. Bref. Je donne tous ces détails pour dire à quel point mon attitude n’est pas celle habituelle de quand je vais voler. Quand je vais voler, je prépare mes affaires minutieusement la veille – limite maniaquerie et petits rituels perso… tout ça pour dire à quel point ce lundi matin, je ne suis pas du tout du tout dans le mode « je vais voler » (en fait je veux juste une photo aux cotés de Charles Cazaux pour rivaliser avec la collec de M@tthieu) avec ces histoires de portefeuille/changement d’itinéraire etc, je suis la dernière arrivée et on me briefe rapidement. Oui il y a du Nord mais en restant dans la bulle Montlambert-Chamoux y’a moyen de moyenner et hop une manche de 33 kil est lancée ! j’ai dû mal à en croire mes oreilles !
dans le très local de Montlamb on va faire comme suit : on tire à peine vers le lac de la thuile, presque pas du côté de l’Arcluse, on va en plaine –sur les petites buttes centrales, ensuite Chamoux, puis une balise qui nous emmène dans la direction de Val Pelouse et retour à Montlambert. J’hallucine un peu, mais ils ont l’air tellement calmes et confiants que je me dis que je vais me mettre en l’air rien que pour me prouver que j’avais tort d’être autant sur mes gardes et que parfois, on a des a priori sur les conditions et qu’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. En plus si ça ne me plait pas je le saurais tout de suite et j’irai poser dare dare.
On monte au déco, le ciel est bleu certes mais avec beaucoup de nuages pas très hauts, il y a une belle casquette grise sur Montlambert, et des voiles qui volent déjà 200-400 mètres au-dessus du déco. On arrive, on étale nos voiles, il y a pas mal de monde. On rentre les balises dans nos instruments respectifs et ça prend un temps certain… Quand on est enfin prêts à décoller, les personnes encore en l’air sont plutôt basses, l’ombre a gagné du terrain, et on se demande si on ne va pas faire une fléchette. Moi je suis déjà dans la sellette, la voile en bouchon, je m’avance pour décoller (les conditions au déco ne sont pas malsaines, rien d’alarmant en l’air non plus voire le contraire, c’est calme!). Cyprien me met un stop (on a l’air d’être dans un coup de mou niveau condi, attends au moins que Charles ait décollé, c’est lui qui va jouer les fusibles). Charles Cazaux en fusible, c’est la classe à Dallas mais est-ce que c’est vraiment significatif pour nous? le stage cross de Prevol envoie un autre fusible (le mec vole quand même en peak mais bon c’est pas CZ donc peut-être un poil plus réaliste).
C’est clairement moins bon qu’au moment de notre montée au déco mais ils ne posent pas non plus, survivent et parviennent même petit à petit à s’extraire. Je décolle avec une autre nana. A ce moment-là, le vent du Nord et les risques de voler dans des conditions telles que seuls des fous mettent leur stab dehors sont un peu mis à l’arrière-plan dans mon cerveau et je me concentre surtout sur le fait que c’est tout gris et qu’il va falloir se battre pour tenouiller, tenter de faire le plaf, puis rejoindre B1 (une chose à la fois).
Je fais court mais en gros, j’ai fait un vol dans du tout petit, dans du tout gris, je me suis refaite dans du dynamique, du petit thermique. J’ai progressé piano piano et j’ai fini par me vacher en atteignant B3 (dans le milieu de vallée avant de rejoindre Chamoux). On a redécollé de Chamoux, et c’était [i]Le Magic Chamoux de mon enfance /i, un thermique qui t’emmène au nuage en en un rien de temps, plaf vers 2300-2400, j’avance vers la balise au Sud, je suis tellement haute, j’ai l’impression qu’Allevard est à portée de main. Je transite vers Montlambert, sous un ciel de cinéma (Canal), une fois arrivée vers Montlamb, il est 16h bien tassée, je me dis “exercice Mathilde ! mise en situation : tu es en cross après une transition et tu dois te refaire” eh bien je cherche comme un chien truffier et je me refais en plaine devant le déco, au-dessus d’une vigne dans un tout petit thermique, très faible, un poil décalée par la brise, ça monte touuuut douuucement, je remonte patiemment jusque 1400 m d’altitude (partie à 650). On m’assure en radio que ce n’est pas la peine de poser au déco, quelqu’un est déjàa parti chercher le camion. Je profite du paysage et je pose en bas.
Fin de journée, j’ai fait deux vols d’1h15, dans des conditions super smooth, en très bonne compagnie. What else ? ah si, il parait qu’il y avait du Nord à décorner les bœufs ce jour-là.
Pour la première fois de ma vie, ce lundi 6 Mai 2019, j’ai fait partie de ces grands malades, ces morts de faim, ces inconscients qui sont allés voler alors que les prévis n’étaient qu’alerte rouge et autre signal d’alarme +++ (un gars très expérimenté de mon club a écrit le matin à 9h “Hola, J’espère qu’il n’y a pas d’hésitation pour personne: le parapente reste dans le sac. A+”). Et pas une seule fois je n’ai rencontré ce vent de Nord tant redouté. A méditer.





plus sérieusement, une passion par définition est exclusive. 