Gestion de la peur

:pouce: @ Charognard

Je ne comprends pas bien pourquoi Ben fait chevaucher César sur Jolly Jumper. En tout cas ni le bonhomme ni le cheval ne laissèrent le souvenir de poltrons, peut-être est-ce là la raison de l’insertion de cette image sur un fil destiné à la gestion de la peur ?
Je redoute d’avoir écrit une sottise mais ce n’est pas de la peur.
:trinq:

Merci à tous pour votre participation !! :trinq: :ppte: :speedy:

@Dilmo, je viens juste de lire ce fil et je découvre le texte de Catherine Schmider.
Super, grand merci de l’avoir exhumé ! je t’ai envoyé un mail.

Bonjour!
Il faut bien dissocier la peur d’un danger objectif (vent ou conditions trop fortes, incident de vol ect…)de la peur du vide. Autant il est utile et raisonnable d’avoir peur dans ce premier cas, autant la peur du vide est contre productive, puisqu’on est plus en sécurité avec 1000m de gaz sous les pattes qu’à gratter le caillou! Et cette peur du vide, c’est une question d’accoutumance, j’ai bien vu ça dans mes activités de loisir (spéléo, escalade) ou professionnelles. Au début j’avais peur du vide, comme tout le monde, puis je m’y suis habitué. Après de longues interruptions, il me faut 1 ou 2 jours pour me ré-accoutumer. Le plus simple pour s’y entraîner, c’est de faire de l’escalade et de taper des rappels. A condition de savoir le faire en toute sécurité, bien sûr, sinon se rapprocher d’un club ou autre encadrement!
Bon vols safe, Denis

rien à voir avec la peur du vide en parapente

Absolument !
La notion traditionnelle du vertige est directement liée au fait d’être relié au sol (escalade, chemin aérien, même balcon à forte hauteur…).
L’appréhension du vide en vol est de nature tout à fait différente.

Je connais au moins un ami pilote qui a vraiment le vertige au sol (immense difficulté pour descendre, encordé avec moi, l’arête sommitale de l’Aiguille du Midi en septembre !) et qui est très à l’aise en vol avec plus de 1 000 m de vide sous les pieds…

Les deux impressions ne sont pas vraiment corrélées.

Marc

La notion de vertige est le lot commun de tous les grimpeurs et alpinistes, ceux qui y sont sensibles ressentent des limites draconiennes à la pratique.
Selon la Faculté, le vertige est produit par un défaut de l’oreille interne.

Pascal avait le vertige dans sa chambre et il en traita fort doctement. On s’aperçut après sa mort qu’il avait un hémisphère cérébral atrophié et on y vit la cause de ses vertiges, l’ignorance crasse des médecins de l’époque peut excuser une telle erreur.
En gros, l’équilibre en station debout est le résultat d’une corrélation entre les perceptions du sol données par les pieds, de l’environnement donné par la vue, le tout étant réglé par l’oreille interne.
Les animaux (à 4 pattes) ne sont pas sensibles au vertige, ni les mouches qui crapahutent au plafond.
Dans un avion, on ne ressent pas le vertige, pourtant il y a du gaz dessous, mais on est dans un environnement rassurant comme au sol.
Sous un parapente, on est assis et les fesses ne donnent pas les sensations de recherche d’équilibre comme la station debout bipédique. On peut avoir les jetons quand on est très haut mais ce n’est pas du vertige.

Il en va autrement pour les grimpeurs parce que la station debout est très aléatoire. Sans corde, c’est parfois impossible et nous avons tous pesté contre des sarpés terrorisés descendant à reculons l’arête de l’Aiguille du Midi, ce qui cause des bouchons infernaux. Les mêmes sarpés allant très bien une fois en bas de l’arête, décolleront sans problème pour un vol magnifique.

Quand on démarre une descente en rappel, il y a parfois un moment délicat quand on arrive au bord d’un surplomb et qu’on va continuer “en fil d’araignée”. La position suspendue à la corde dans le vide pourrait déclencher le vertige mais quand on arrive à ce niveau de pratique c’est qu’on n’y est pas sensible. Et bien assis dans le cuissard, on est comme dans une sellette.

Il y a à Saffres (dans le 21) une tour séparée de la grande falaise d’une vingtaine de mètres. Une fois, lors d’une sortie d’escalade avec mon club, j’ai installé une tyrolienne entre la falaise et la tour… et de tous les grimpeurs du club présents ce jour-là, nous ne fûmes que 3 à nous lancer dans la traversée aller-retour. Les autres avaient tout simplement peur de démarrer la traversée tête en bas pour pouvoir ramper sur la corde, cette position déclenchant le phénomène du vertige, qu’ils n’avaient pas en paroi… quand ils étaient encordés.

Cet exercice fait partie du parcours du risque installé dans tous les camps militaires et quand j’étais à l’armée (6e BCA - Grenoble) les gars s’arrêtaient là, pourtant le câble sur lequel on rampait n’était pas très haut. Ils avaient peur.
Quand je faisais grimper mon lieutenant sur le mur d’escalade du quartier, il dégoulinait de trouille et cela se sentait, mais il y allait parce que le chef doit montrer l’exemple. Il venait de l’infanterie de marine, ce n’était pas un charlot, mais les sensations qu’il avait en escalade le rendaient malade : il était sujet au vertige.
Dans son ouvrage “le diable des Dolomites”, Tita Piaz raconte comment il dut inventer la tyrolienne pour atteindre le sommet de la Guglia De Amicis. Ce fabuleux grimpeur du début du 20e siècle raconte avec humour comment les prières et autres signes de croix ne lui furent d’aucun secours… et il s’amuse du ressenti identique de Edmondo De Amicis (président du Club Alpin Italien) quand il l’y emmena.
Piaz avait buté sur toutes les faces de cette aiguille de 60m, c’est Hans Dülfer (tué devant Arras en 1915) qui en fit la première ascension.

Je n’ai jamais eu le vertige en escalade, pas même dans des voies surplombantes des Dolomites, mais je me rappelle quand j’étais encore très novice et que j’essayais l’Ultralite 19, en sellette-string et sans secours, avoir enroulé un énorme thermique sur la Rochette, derrière le déco de Montmin, qui m’avait montée à 2500m, et m’être sentie extrêmement vulnérable tout là-haut, loin au-dessus des montagnes et des autres voiles, mais ce n’était pas du vertige ni de la trouille, c’était autre chose.
Cette sensation, je ne l’ai pas eue un mois après en décollant en nord à l’Aiguille du Midi, avec 2700m de gaz sous les pieds, toujours sous l’Ultralite 19 en sellette-string et sans secours. Je ne l’ai pas non plus en transitant des Dents de Lanfon ou du Semnoz vers le Roc des Boeufs.
C’est probablement un effet de l’habitude.

Courir sur des poutrelles métalliques de 30cm de large à 20m du sol dans le chantier de la fac, avec les CRS aux fesses, me fut évident. Eux, avec leurs rangers et tous leur fourbis mais aucune pratique aérienne, ne purent pas me suivre et il fut facile de leur échapper. En d’autres circonstances, nous ne nous serions peut-être pas engagés aussi facilement.

La peur du vide en parapente, je l’aurai probablement le jour où je décollerai de l’Aiguille Verte. Je m’y prépare mentalement depuis des années, au point que le problème s’est déplacé dans la remontée en solo du couloir Whymper, pourtant pas du tout vertigineux et que j’ai descendu plusieurs fois dont une en ramasse avec les crampons, sans corde, un truc de dingue mais la neige extraordinaire le permettait.
Avec l’UFO ou la Skin, on doit avoir des sensations stressantes en décollant d’endroits très exigus qui obligent à se jeter dans le vide. Je ne pense pas que ce soit du vertige.
:trinq: