Je disais à Laurent Van Hille sur le déco de Samoëns qu’il y avait longtemps que je n’avais pas “sketché”. :sors: Un grand bien d’ailleurs de voir des vols se dérouler sans encombre, sans histoire, sans péripétie. Cela fait du bien de prendre des marges de sécurité, de ne pas se mettre dans le rouge et surtout de ne pas flirter avec l’incident.
Pourtant en cross (depuis que je dis ça, ça me fait sourire - comme si c’était une activité à part car génératrice d’émotions plus fortes, plus denses) il n’est pas rare de devoir flirter avec une limite acceptable (raser les rochers pour chercher l’ascendance, faire du rase-mottes avec la cime des arbres pour tenir dans le dynamique et remonter peu à peu la crête), une limite que l’on peut reculer ou pas selon son vécu, sa forme du moment et surtout les conditions météos du moment : rafales de vent, dégueulantes qui peuvent vous projeter contre la paroi ou les arbres).
Mais c’est d’atterrissages dont je veux vous parler aujourd’hui. On jette un coup d’oeil circulaire, voir où on pourrait encore se refaire, des branches d’arbres qui frémissent, des rochers ou des champs qui pourraient encore donner.
Justement, la magie de l’abnégation est parfois récompensée quand on voit des vaches paître paisiblement https://www.google.fr/maps/@46.255226,6.5791867,210m/data=!3m1!1e3 et que cela fait 500m que l’on descend, qu’on a bien repéré des champs dégagés (si possible en jachère), sans barbelés, sans obstacles, sans danger et si possible près d’une route pour la récupération. On sort de sa sellette prêt à effectuer un large 360 et voir où peut être le vent s’il y en a quand soudain, le vario bipe et qu’à force de persévérer on remonte dans un thermique surgi de nulle part 1000 m et qu’on dépasse la crête pour repartir de nouveau à l’assaut des nuages. Un moment magique qui fait qu’on se dit qu’il ne faut jamais désespérer et que la nature est généreuse.
Mais le moment fatidique où il faut songer à poser arrive toujours… car c’est inévitable, tout s’est éteint, le voile de nuages bâche tous les thermiques qui existaient naguère, bonne volonté ou pas, talent ou pas. Et c’est toujours le coeur serré que l’on se dit que le voyage doit prendre fin au son du vario qui vous déchire l’âme.
Dans le même vol https://www.google.fr/maps/@46.2840744,6.5501195,105m/data=!3m1!1e3 avec cet espoir identique,dans la vallée de Bellevaux, on se retrouve coincé entre une falaise à gauche, des bois, la rivière Brevon à droite, des lignes électriques ou téléphoniques et on descend inexorablement; on a laissé passer sa chance de poser confortablement dans un champ et on essaie d’avoir la finesse max pour franchir quelques arbres, passer de l’autre côté, chercher des arbres accueillants si le pire devait arriver et ô miracle une trouée, une scierie, la route et un endroit dégagé pour poser. Ne pas regarder les obstacles, ils n’existent, pas, pomper et toucher volontairement le haut d’un arbre pour pouvoir casser la finesse et descendre bas, faire un demi-tour au-dessus de la scierie, ne pas se prendre les arbres en face, pomper pour atterrir au plus près, relâcher le tout, poser sur la route attenante à la route principale en toute sécurité (le traffic y est moins dense).
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Atterrir parfaitement sur ses deux pieds et affaler la voile. Voir une vieille dame se demander d’où vous sortez. Ne pas avoir eu peur sur le coup mais rétrospectivement se dire qu’on a eu beaucoup de chance et remercier Dieu ou sa bonne étoile d’être intact. Appeler la récup, aller dire bonjour à la vielle dame. Moins zen qu’atterrir comme la veille au stade de foot de Montriond près de Morzine car on n’avait pas assez de gaz pour rejoindre un champ mais cela me fait dire que l’atterrissage en cross est une aventure…qui peut mal se terminer si on cherche la limite à chaque fois. Il faudra que je donne une limite à ne pas franchir et avoir la sagesse de poser en me disant “tant pis si ça remonte derrière ce relief” quand c’est terminé c’est terminé…
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Par contre pendant les ploufs, pendant les différents stages on essaie de faire la cible et ça c’est très formateur pour les réflexes. Le problème des atterros très larges c’est qu’on ne s’en fait pas, ça posera dans le bon espace. Ce que j’ai vécu ces deux derniers atterrissages, c’est la gestion du stress (le terrain de foot était bordé de hautes barrières d’une dizaine de mètres empêchant le ballon de passer dans la rivière - ce qui m’a surpris… et évidemment l’atterro sur la route entre la scierie, la maison, la ligne téléphonique et les arbres - pas classique du tout), c’est la capacité du cerveau à se concentrer en mode “vital” pour faire un truc propre et à ne pas focaliser sur les obstacles éventuels. L’oeil est essentiel car une fois qu’on a choisi sa “cible”, le corps et la voile font le reste même après un 180° à moins de 7 m du sol. Pas d’autre possibilité sinon se prendre un obstacle…
Mais les qualités essentielles (à part la capacité d’analyse doublée de sagesse qui dit qu’il faudrait peut-être se poser avant que…) c’est bien la capacité d’adaptation et respirer très fort !
Mais promis j’essaierai de pas trop recommencer (la route, pour le stade c’était plus confortable)



