Orthographe (et donc flood !)

Bon je m’étais dit que je n’interviendrais pas ici mais quand même il y a des limites aux énormités que l’on puisse écrire !

A Aix en Provence, un laboratoire de recherche se penche sur la langue parlée, à la suite de Claire Blanche-Benveniste, malheureusement disparue. Son propos : savoir “comment qu’on cause”, en vrai, dans la réalité réelle, et non dans les fantasmes délirants - et collectifs - de ceux d’entre nous qui ont bien intégré la prescription normative de l’Académie Française version 17e siècle (lire Vaugelas et ses Remarques sur la langue française destinées en premier lieu à rendre compte de la façon de parler de “la meilleure partie de la cour” et à ériger celle-ci en norme).
Blanche-Benveniste et ses collègues ont constitué un corpus (un ensemble d’enregistrements) d’échanges ou discours oraux, spontanés, pour les analyser et en dégager les particularités.
Outre diverses caractéristiques que l’on pourra lire dans Approches de la langue parlée. 1997, Gap, Ophrys, il ressort que l’omission de la double négation, loin d’être le fait de mauvais locuteurs, est la norme au sens du fonctionnement normal.
Par exemple, Françoise Gadet, autre linguiste, a procédé à l’enregistrement d’une même personne au petit déjeuner et dans sa vie professionnelle d’enseignant du supérieur. Au petit déjeuner : un seul “ne” en une heure d’enregistrement (et encore, dans une situation où il rapporte les propos de quelqu’un d’autre) ; dans un cours en amphi : une écrasante proportion de “ne”, le “ne” s’efface parfois lorsque l’enseignant revient à un registre spontané et répond aux questions des étudiants. Source : Gadet Françoise, (1997). Le français ordinaire. Paris, Armand Colin, chapitre 11.

Conclusion : l’utilisation ou non de “ne” est affaire de registre de communication. Dans une situation où l’on doit s’exprimer avec correction, on l’utilise - et cela demande parfois un effort et une autosurveillance. Dans une situation d’oral spontané qui ne réclame pas spécialement de correction, on l’omet. Pourquoi ? Par principe d’économie : dire “je veux pas de ça”, “je vois rien”, etc. “économise” un peu d’énergie articulatoire (n’oublions pas que la production de la parole est une activité cognitivement très coûteuse) et l’adverbe placé après le verbe (pas, rien, etc.) suffit amplement à signaler la négation.

Pour finir, je mets au défi les plus puristes d’entre nous de s’enregistrer en continu sur une journée et de traquer les négations : je doute de voir apparaitre 100% de “ne” dans les phrases négatives (pour autant que l’on fasse des phrases à l’oral, mais c’est une autre question).

Merci à ceux/celles qui ont lu jusqu’au bout.

Edit : j’avais pas vu :wink: la réponse de BiBeb, finalement la mienne complète et développe

Bonjour,

J’ai bien compris ton message.

Alors comment se fait-il que l’on était tellement sensible aux discours officiels de Sarkozy qui ne prononçait pour ainsi dire jamais les “ne”, ce qui surprenait beaucoup en l’entendant et qui avait été relevé à de multiples reprises dans les médias comme étant une véritable incorrection dans l’expression de la langue française ?

Et merci d’écrire "Bon je m’étais dit que je n’interviendrais pas ici mais quand même il y a des limites aux énormités que l’on puisse écrire !".

Je n’avais pas l’impression d’écrire des “énormités”, mais puisque tu le dis, j’en prends acte…

:trinq:

Marc

où l’on retrouve les éternels conflits entre normatifs et linguistes…

Marc, ne te vexe pas, l’énormité était d’écrire :

C’est tout l’inverse, en réalité… D’où ma réaction qui ne te visait pas en particulier (et surtout je ne voulais pas t’offenser) mais qui visait à alerter sur nos fausses représentations de notre propre langage.

Et pour répondre à ta question à propos de Sarkozy : ce qui choque dans son parler est précisément le décalage entre ce que l’on est en droit d’attendre d’un homme d’état dans une situation publique et le relâchement, voire l’incorrection (par rapport à une norme soutenue), de son discours. C’est un bon exemple de ce que j’écrivais : dans certaines situations, l’on se doit de respecter scrupuleusement la norme, or il ne le fait pas. Plusieurs explications à cela : il veut faire “peuple”, causer “comme qu’on cause, nous”, ne pas sembler déconnecté des classes populaires ; il ne manie tout simplement pas bien la langue ; un peu des deux :lol:

Quant à moi, j’ai écrit “je ne voulais pas intervenir”, mais je me rends compte à lire les pages précédentes que je suis déjà intervenue, à travers certains propos rapportés … ROTFL

Dans le même style, on avait déjà eu la fameuse liaison sur “les handicapés” avec Chirac.

Marc : un :bisous: et une :trinq: , flood de flood : chaque automne, je surveille les condis au vieux chaillol et je te remercie intérieurement pour ton travail !

Pour marc et les autres
en ce qui concerne la terminaison er, é des verbes.
quand j’écris en réfléchissant au contenu de ma phrase je met er ou é de manière indifférente.
si je me relis je corrige facilement, la règle est simple.
comment ça se passe pour vous ?

  • vous mettez la bonne terminaison sans réfléchir ?
  • vous devez vous relire pour corriger ?
  • vous arrivez à réfléchir au contenu et à l’orthographe en même temps ?

Bonjour,

Pour le participe passé et l’infinitif des verbes du 1° groupe (“er” ou “é”) je ne réfléchis pas et je pense que j’écris spontanément la bonne orthographe dans 99 % des cas.
Si je me relis, je pense que je corrige à chaque fois (au cas où je me serais éventuellement trompé).
Mais bien sûr personne n’est infaillible : il m’est arrivé sur ce forum de me tromper une fois sur cette faute archi classique (je ne m’étais pas relu et j’avais envoyé mon message trop rapidement) et évidemment un membre du forum n’avait pas raté l’erreur et l’avait signalée ! :pouce:

Marc

J’ai déjà décollé 3 fois du Vieux Chaillol (vol magnifique !).
Je pense que ma condition physique est suffisamment revenue (?) pour que je puisse y retourner à nouveau (quitte à décoller sous le sommet si je n’arrive pas à monter jusqu’en haut).

Si tu programmes d’y aller, et si je suis libre, je viendrai volontiers avec vous (si vous m’acceptez bien sûr…).

:sors: (c’est hors-sujet de ce fil consacré à l’orthographe).

Marc

Personnellement, ayant été un gros lecteur éclectique, j’écris et je mets les terminaisons sans réfléchir à rien.

En ce qui concerne le sujet de la maîtrise de l’expression écrite, je continue de penser qu’un bon marqueur de la notion de “maîtrise” passe par la pragmatique. C’est à dire qu’un des aspects fondamentaux de la langue est de transmettre efficacement l’information voulue. Or, un texte bourré de fautes d’orthographe (ou “erreurs orthographiques” si on veut retirer l’aspect moralisant) ralentit ma lecture et brouille la portée informative du message (je suis obligé de prendre du temps pour comprendre ce qu’il veut dire).
Par exemple, sur le fil d’une petite annonce de vente, j’ai récemment vu le dernier message qui commençait par “a fermé”… Et là je me dis “Qui a fermé ? Que s’est-il passé ? Pourquoi tout d’un coup on parle de fermeture dans les ventes”. Bref ça me semble totalement incongru, hors contexte et il me faut un peu de temps (et d’énergie cognitive) pour comprendre que le l’intervenant veut dire que le fil est à fermer car l’objet a été vendu.
On voit comment la question de l’orthographe perturbe la transmission d’info entre ceux qui ont la technique et ceux qui ne l’ont pas (ici, contamination de l’écrit par la forme orale, alors qu’un bon technicien ne passe pas par la représentation des sons pour écrire) et comment commence à se scinder le public, car ceux qui doivent faire un effort pour comprendre sont agacés puisque justement ils voudraient pouvoir utiliser la puissance de l’outil pour ne pas avoir à faire d’effort (c’est l’orthographe correcte qui désambiguïse sans effort le sens entre “a fermé” et “à fermer”).

@Marc :
Pas de soucis ! Dès que j’y vais je te fais signe avec grand plaisir !
J’irais bien me faire le pic turbat aussi cet automne !

En ce qui me concerne, je ne réfléchis pas à l’orthographe, j’écris sans me poser de questions :

  • écriture au clavier -> erreurs possibles (pas celle-là en particulier, mais en général) donc relecture pour correction générale, mais pas 100% efficace ;
  • écriture manuelle -> peu voire pas d’erreurs, mais relecture quand même, généralement très efficace.

Tout le monde fait des erreurs dans les mails, les messages de forum, etc. Je n’ai pas connaissance de recherches permettant d’expliquer comment notre perception est modifiée entre une lecture à l’écran et une lecture papier, mais le fait est que le média informatique ne permet pas la même correction (et ne parlons pas des messages envoyés via les tablettes, phablettes ou smartphones, y’a qu’à voir certains sur le forum, c’est une horreur !). Ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas se corriger, mais il faut rester philosophe et surtout tolérant et bienveillant envers les autres.
:bisous:

Je ne connais pas la solution pour que cela viennent spontanément, j’ai beau connaitre la règle, si je ne suis pas concentré c’est du 50%.
ça me conforte dans l’idée que nous somme pas tous égaux face à ce défit qui est d’écrire correctement .

Une piste possible c’est que sur papier la mémoire visuelle peut détecter des erreurs plus facilement que sur écran, pour moi c’est le cas.

Se surveiller mutuellement et indiquer gentiment les erreurs est un bon moyen de progresser aussi et d’éviter de répéter les mêmes (ce qu’on appelle la sédimentation des fautes quand on apprend une langue).

@Aime-P : je me demande si ce n’est pas un souci d’interférences entre la lecture sur l’écran qui fausse le trajet du regard et l’écriture qui mobilise autrement la sphère motrice avec un clavier qu’avec un stylo… mais ce n’est qu’une hypothèse.

Je suis un vrai zéro en ortographe mais pour le coup ya pas plus simple. Je remplace systématiquement par un verbe du 3em groupe, ça le fait sans réfléchir. Je me suis fait ‘battre’/‘tromper’ ; je me suis ‘battu’/‘trompé’

Il est clair que j’ai appris à écrire avec papier / stylo - comme nombre d’entre nous puisque nous sommes des vieux dans le parapente (vieux = + de 45 ans) - et que diverses recherches sur l’acquisition de l’orthographe montrent l’importance de l’incorporation par la sphère motrice. Mais ça ça explique la production des erreurs.
Effectivement, peut-être le problème à la relecture vient-il de ce que la fixation oculaire ne peut être la même à l’écran… En tout cas, si quelqu’un a des références à donner sur le sujet, je prends :slight_smile:

ça me conforte dans l’idée que nous ne sommes pas tous égaux face à ce défi t qui est d’écrire correctement .

C’est comme la sécurité en parapente, c’est aussi une question d’attitude.
Dans la phrase citée, je pense qu’il n’y a pas de relecture (qui aurait au moins éliminé l’absence du “ne” et du “s”). Il y a volonté d’émettre (vite) le message mais pas volonté de l’émettre en respectant les formes. Ceci peut-être parce qu’en tant qu’émetteur du message, tu n’as jamais pris conscience qu’une forme dite “soutenue” dans l’expression augmentait l’efficacité, la richesse et la rapidité de la communication globale.
On est trop souvent sur le seul objectif à court terme d’émettre notre message, sans avoir la perspective globale de la communication collective.

J’ai d’ailleurs déjà proposé qu’il ne soit pas possible de poster un message sur le forum sans passer par la fonction “visualisation”, qui permet de se relire. *

  • ce message a été relu ; dites-moi si l’efficacité de la relecture est bonne…

Je ne suis pas d’accord avec toi.
ce n’est pas une question de volonté, mais d’une somme d’effort différente d’un individu à l’autre pour obtenir le même résultat.
c’est le sens de l’échange sur les er et é.
c’est bien plus facile lorsque l’on écrit spontanément à 99% sans fautes.

ou peut-etre simplement des gentilles approximations proférées comme des vérités.
ca doit être une habitude que les parapentistes développent à travers la méca-vol;
on cherche pas forcement les bases pour comprendre, mais on explique tout :wink:

:grat: … le pt godwin arrive à grands pas :affraid:
essayons de comparer ce qui reste comparable !!

la langue francaise étant ce qu’elle est, y aura tj moyen d’ergoter ! :sors:

karma+ pour la tolérance et bienveillance envers les autres.

Tout à fait !
J’ai déjà signalé ici que mes interventions ne doivent surtout pas être considérées comme stigmatisantes, critiques ou méprisantes vis-à-vis de qui que ce soit.
J’ai créé ce fil pour qu’on puisse échanger sur ce sujet (en dehors des fils de discussion), mais il n’y a bien sûr aucun jugement de valeur envers les intervenants sur le forum qui font des erreurs.
En parler peut sans doute aider certains à en faire moins…

Marc